Je le met là histoire qu'on rigole un peu aujourd'hui (pleins de sujets piquant entre ça et la menace de boycott des supporters
«Je suis triste de devoir me battre contre mon club»
Chris McSorley s’exprime en exclusivité après la procédure de conciliation de lundi avec Genève-Servette, qui a échoué. On se dirige vers un procès. Le président du club, Laurent Strawson, donne sa position.
Ce n’est plus un bras de fer, c’est désormais une guerre. Lundi, la séance de conciliation aux Prud’hommes a figé les positions, plus que jamais. D’un côté, un employé qui conteste son licenciement, Chris McSorley, accompagné de ses avocats, Me Cédric Berger et Me Nathalie Subilia. De l’autre, le club qui l’a viré en août 2020, le Genève-Servette Hockey Club, représenté par son président, Laurent Strawson (lui-même avocat), et Me Gabriel Aubert. La conciliation n’ayant rien concilié du tout, c’est vers un procès retentissant que l’on se dirige. D’ici à la mi-mars au plus tard, Chris McSorley va déposer une demande en paiement au Tribunal des prud’hommes. Épilogue d’un divorce houleux, dont l’ex-homme fort du hockey genevois parle ici en exclusivité.
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Plusieurs millions sont en jeu, autour d’un contrat à durée déterminée qui lie McSorley au Genève-Servette Hockey Club jusqu’en 2028, selon les conseils du Canadien, Me Berger et Me Subilia. Une lecture que réfute le club, qui a licencié son directeur sportif en invoquant de justes motifs.
Le rappel des faits
Retour en arrière. En janvier 2018, Genève-Servette, dirigé par un aréopage de Canadiens, est au bord de la faillite. La Fondation 1890, qui détient déjà le Servette FC, sauve le club de la banqueroute et replace en avril McSorley au poste d’entraîneur (il avait été écarté de la bande en 2017 pour n’être alors plus que directeur sportif). Un an plus tard, en 2019, la nouvelle direction fait de Pat Emond le nouvel entraîneur, Chris McSorley redevenant directeur sportif. En juillet 2020, il est démis de ses fonctions. En août 2020, il est licencié avec effet immédiat.
Août 2020, c’est le point d’orgue d’un désamour de deux ans qui couvait entre l’ex-homme fort des Vernets et la nouvelle direction, qui voulait faire table rase du passé. Et peut-être se libérer de l’encombrant contrat.
Les justes motifs
La raison du licenciement pour justes motifs? «Le club soutient que je n’ai pas rempli ma mission dans le cadre du développement du dossier de la nouvelle patinoire, explique McSorley. C’est ridicule. Je ne suis pas un architecte, je suis un entraîneur ou un directeur sportif. D’ailleurs, c’est clairement stipulé dans mon contrat. Je vois là surtout un prétexte pour ne pas honorer les engagements qui ont été pris par une direction précédente, mais que l’actuelle doit respecter. Le respect, c’est pourtant tout ce qui manque à mon égard dans cette affaire.»
Durant plus de deux ans, Chris McSorley dit avoir subi des pressions, les prémices de l’issue fatale. «Pour la seule année 2019, j’ai reçu plus de 800 mails du conseil d’administration du club, lance-t-il. On me demandait tout et rien à la fois. Par exemple, je devais chaque semaine rendre un rapport circonstancié sur mon cahier des charges. Je n’ai jamais eu le moindre retour sur ces demandes auxquelles j’ai toujours répondu, alors qu’elles étaient toutes urgentes et indispensables selon la direction. Quand j’étais le directeur sportif du club, on m’interdisait aussi de voyager avec le car de l’équipe. On a également transféré mon bureau des Vernets à la Praille, au siège de la Fondation 1890, dans un premier temps. Et avant même mon licenciement, on l’a carrément enlevé.»
«On veut me salir»
Plus grave pour lui, le sentiment d’avoir été dénigré et accusé à tort. «J’ai eu des retours, via des témoins, selon lesquels la direction actuelle laissait entendre que j’avais pu toucher des commissions, lors de transferts de joueurs, assure McSorley. Cela n’est jamais arrivé! Jamais! On veut salir mon nom, ma réputation. On peut dire beaucoup de choses de moi. Mais je ne suis pas un voleur. On m’a dit également que j’étais trop vieux pour le job, que j’étais dépassé. Mes choix quant à plusieurs joueurs de l’équipe actuelle démontrent pourtant le contraire. On m’a même menacé, alors que c’est illégal, de déduire de mon salaire quatre jours de vacances supplémentaires que j’ai pris en été 2019, avec un premier accord d’un membre de la direction. Quatre jours sur plus de 7000 passés à vivre 100% pour ce club, en plus de dix-neuf ans. Même en vacances, j’étais toujours joignable et actif. Je précise aussi qu’en 2018, quand les finances étaient au plus mal et qu’on nous demandait de faire des efforts, j’ai abandonné plusieurs dizaines de milliers de francs au club. C’est triste d’en arriver là aujourd’hui.»
En être là aujourd’hui: devoir se battre pour faire valoir l’imposant contrat au cœur de la guerre déclarée. On parle là d’un document qui remonte à 2014, qui englobe la vente de 50% des actions du club dont McSorley était détenteur et l’établissement du nouveau contrat de travail. De 2014 à 2023 pour commencer. Avec la possibilité d’obtenir un nouveau contrat de 2023 à 2028 pour autant que certains critères fixés à l’époque soient atteints.
Précision sur le contrat
«Les objectifs ont déjà été atteints et la possibilité d’obtenir un nouveau contrat de 2023 à 2028 s’applique donc, précise Me Cédric Berger, l’avocat de Chris McSorley. Si l’on peut toujours s’interroger sur la validité d’un contrat à durée déterminée qui excède les dix ans, la question ne se pose pas ici, puisque mon client dispose seulement d’un droit à la conclusion d’un nouveau contrat. Ceux qui l’ont conclu l’ont par ailleurs fait en toute connaissance de cause: les dirigeants de l’époque souhaitaient s’engager sur le long terme avec mon client après avoir racheté ses actions, justement pour valoriser celles-ci, en travaillant avec celui qui représentait, avec le succès que l’on sait, le hockey à Genève. La direction actuelle, qui a eu accès aux différents contrats au moment du rachat et qui n’est pas censée en ignorer la teneur, en hérite donc logiquement et doit les honorer. Cela vaut pour mon client comme pour n’importe qui.»
En l’état, Chris McSorley n’a plus touché le moindre salaire depuis le mois d’août 2020. Un arrangement est-il encore possible? Après quelques discussions sans entente, c’est ce qui était au programme de la séance de conciliation aux Prud’hommes de lundi dernier. Selon nos informations, les représentants de Genève-Servette n’ont pas souhaité entrer en matière lors de ce rendez-vous.
«Personnellement, j’étais prêt à négocier un compromis, assure Chris McSorley. Je suis très triste de devoir me battre aujourd’hui contre mon club, que j’ai grandement contribué à construire et à élever dans la hiérarchie du hockey suisse pendant plus de dix-neuf ans. Je suis fier de ce que j’ai fait ici, fier de l’équipe aussi. Mais je m’interroge sur son futur avec la direction actuelle.»