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par Taggle » lun. 25 juin 2012 22:29
Le papier en question, qui relativise vraiment la "petitesse" du budget du GSHC (les assurances ont souvent été avancées pour justifier l'engagement de nouveaux joueurs, etc):
(® François Rossier / La Liberté)
Ces mal-aimés qu’il faut assurer
Accidents • Les assurances n’aiment pas le risque. Elles n’aiment donc pas les sportifs pros. Conséquence: pour se protéger, Gottéron, Olympic et Elfic paient cher, très cher.
En l’espace de quelques jours, Fribourg-Gottéron, Fribourg Olympic et Elfic Fribourg ont tous trois perdu des joueurs majeurs sur blessure. Les hockeyeurs doivent composer sans Pavel Rosa, Andreï Bykov et Shawn Heins, les basketteurs sont privés de Jonathan Kazadi, alors que les basketteuses ont dû évoluer sans Celeste Trahan, revenue au jeu samedi après avoir été sévèrement touchée à un œil. Des coups durs dont les clubs fribourgeois se seraient évidemment bien passés.
Si la perte d’un joueur nuit inévitablement au rendement d’une équipe qui doit souvent revoir ses ambitions à la baisse, elle a également un impact sur les finances des clubs touchés. Et ce peu importe le budget. Qu’il soit énorme comme à Gottéron (environ 12 millions de francs), important comme à Olympic (1,43 mio) ou modeste comme à Elfic (200000 francs). Pour limiter la casse, les dirigeants s’appuient sur l’assurance-accident (LAA). Une assurance pour laquelle ils sont prêts à consentir beaucoup d’efforts.
«Ne pas jouer au cow-boy»
«En Suisse, l’assurance-accident (LAA) est obligatoire pour tous les salariés d’une entreprise. Les joueurs de hockey ne font pas exception. Dès le moment où le salaire est déclaré, le joueur est assuré, rappelle en préambule Raphaël Berger, le directeur de Gottéron. Il n’y a aucun intérêt à économiser sur les primes d’assurance. C’est un risque qu’on ne peut tout simplement pas se permettre quand on gère des hockeyeurs.»
Cédric Allemann, directeur spor-tif d’Elfic, partage le même avis:«On ne veut pas jouer au cow-boy. Si Celeste (réd.: Trahan, l’Américaine) avait perdu son œil et qu’on se retrouvait à devoir payer son contrat pendant des années, on ne pourrait évidemment pas l’assumer. Le but d’une assurance est justement de se mettre à l’abri d’un tel risque. Raison pour laquelle on ajoute aussi l’assurance perte de gain, qui n’est pas obligatoire, dans le contrat.»
Les clubs cherchent par tous les moyens à obtenir la meilleure protection possible pour leurs joueurs. Problème: étant donné que, dans le sport, le risque d’accidents est élevé, les compagnies d’assurance ne se bousculent pas au portillon (voir ci-dessous). «Quand on parle de sportifs professionnels, les assureurs sont tout de suite sur les pattes arrière», confirme Cédric Allemann. La couverture accident étant obligatoire, les compagnies d’assurances n’ont d’autres choix que d’accepter la prise de risque. Mais elles le font payer cher, très cher aux clubs. «Cela représente 10 à 20% de notre budget», estime Nicolas Fasel, le responsable administratif d’Olympic. Soit plus d’une centaine de milliers de francs. Une somme qui dépasse allègrement le million de francs pour Gottéron, un club dont la majorité des joueurs touchent un salaire bien supérieur au montant maximal assuré par la loi (réd.: 126000 francs). «Pour couvrir la différence, on conclut des assurances complémentaires et des contrats excédentaires (réd:pour les gros salaires)», explique encore Raphaël Berger. A titre d’exemple et selon nos estimations, Julien Sprunger, victime de plusieurs commotions, d’un grave accident à la nuque et dont le salaire dépasse les 500000 francs par saison, coûte 125000 francs à Gottéron en frais d’assurance-accident.
Une somme qui n’empêche pas le club de devoir délier les cordons de sa bourse, spécialement en cas de grave blessure. L’assurance ne leur verse en effet jamais la totalité du salaire d’un joueur blessé (réd: environ le 80%, payé à partir du 3e jour d’indisponibilité). Mais les clubs, eux, continuent à verser le 100% du salaire. Si le joueur touché est un leader, le club cherchera aussi à engager un remplaçant. «On doit alors débourser un salaire supplémentaire. Il faut aussi prendre en compte tous les à-côtés comme le logement, la nourriture, le véhicule, etc.», énumère Nicolas Fasel.
Un problème qui peut prendre des proportions inquiétantes si les blessés se multiplient. «Si on a trois ou quatre blessés en même temps, cela peut vite coûter cher. C’est pour ça qu’on s’assure le mieux possi-ble, mais, en cas de blessure, il est clair qu’on perd de l’argent», avoue Raphaël Berger. I
«Un nouveau club ne trouvera pas d’assureur»
«Le sportif professionnel n’est pas une clientèle recherchée. Le risque est trop élevé. Toutes les compagnies d’assurance évitent de prendre ce genre de risques», avoue Ben Girard, agent principal de La Vaudoise assurances à Fribourg, qui appuie ses propos avec un exemple plutôt édifiant. «Assurer un sportif professionnel, c’est comme assurer un bâtiment et étant sûr qu’il va prendre feu dans les mois à venir!» Selon les classements établis par la Suva, personne n’est plus exposé qu’un sportif. «Le taux des primes est 200 fois plus important pour un sportif professionnel que pour un employé d’une fiduciaire», compare Ben Girard, On le constate: les clubs ne sont pas accueillis à bras ouverts. Pire même, ils sont carrément éconduits. «Si un nouveau club arrive dans le monde professionnel, il ne trouvera pas d’assureur», affirme avec aplomb Edgar Schafer, directeur de Schafer Assurances SA à Fribourg. «Le club devra faire appel à la caisse supplétive qui consul-tera sa liste d’assureurs pour diriger le club en question vers l’assurance possédant le moins de spor-tifs sous contrat.» Un moyen de répartir les risques tout en assurant à chaque employé l’indispensable couverture.
Une fois l’assurance dénichée commence alors l’âpre jeu des négociations. Un moment toujours délicat à gérer. «Si on n’est pas spécialisé, on peut perdre beaucoup d’argent. Dans le sport professionnel, ce sont de grosses primes d’assurance avec beaucoup de sinistres», avertit Edgar Schafer, courtier en assurances qui gère la couverture de Fribourg-Gottéron, mais aussi de Genève-Servette et de nombreux autres clubs sportifs.
Afin d’obtenir les meilleures primes possibles, les clubs regroupent souvent tous leurs risques auprès d’une seule assurance. «On n’assure pas uniquement les joueurs, mais aussi les employés de bureau de Gottéron. On inclut aussi les bâtiments dans la négociation», révèle Raphaël Berger. «Plus on a de masse, moins chère est la prime», rappelle Edgar Schafer.
Pour faire baisser les tarifs, les clubs ont aussi tout intérêt à diminuer leurs frais au maximum. «L’idée est d’envoyer le joueur tout de suite chez le bon médecin», résume Edgar Schafer, avant de détailler l’organisation qu’il a mise en place à Gottéron. «Le joueur blessé passe d’abord chez Jacques Rody (réd:le masseur) qui l’envoie ensuite chez un spécialiste. En cas de blessure orthopédique, on évite par exemple la visite chez le généraliste. Puis, toujours en collaboration avec Jacques Rody, on rédige l’avis de sinistre, en y joignant le rapport médical. Tout cela nécessite une grande rigueur et une grande précision.»
Cette coordination est aussi rendue nécessaire par la fréquence élevée des blessures. «Durant la saison, on a en moyenne un cas par jour à gérer», estime Edgar Schafer, dont l’un de ses employés est engagé à 50% pour s’occuper uniquement de Fribourg-Gottéron et Genève-Servette! FR
Assurance-accidents LAA
Toutes les personnes salariées qui travaillent en Suisse sont obligatoirement assurées contre les accidents. Les primes de l’assurance contre les accidents et les maladies professionnels sont à la charge de l’employeur. Les primes de l’assurance contre les accidents non professionnels sont à la charge des salariés. Les employeurs doivent verser la totalité des primes. Ils déduisent la part de l’employé de son salaire. Le montant maximum du gain assuré en matière d’assurance-accidents se monte à 126000 francs.
Le cas Esterkamp
Olympic n’a rien reçu
Le 8 septembre 2008, Dave Esterkamp se blesse lors d’un entraînement. Diagnsotic: lésion du cartilage d’un genou. Opéré, l’Américain doit faire une croix sur sa saison. Trois ans et demi après, Fribourg Olympic n’a toujours pas reçu le moindre centime de l’assurance! La raison? La Suva, qui couvrait à l’époque les accidents professionnels des joueurs d’Olympic, a refusé de payer, car elle estime qu’il s’agit d’une maladie et non d’un accident.
Le cas est complexe. «Pour nous, il est clair que c’est un accident. Esterkamp s’est blessé durant un entraînement, mais les assurances ont beaucoup de critères pour déterminer ce qu’est un accident et ce qui ne l’est pas. La Suva a aussi mal interprété notre déclaration de sinistre», explique Jean-Luc Maradan, l’avocat d’Olympic, qui a fait recours au Tribunal administratif cantonal. «Si on nous donne raison, la Suva, qui est endettée, fera recours, devine Jean-Luc Maradan. Si on a tort, il faudra se poser la question d’un éventuel recours devant le Tribunal fédéral...» Dans l’attente d’une décision, Olympic a assumé, seul, le salaire d’Esterkamp. «Cela nous a coûté plus de 50000 francs», révèle Jean-Luc Maradan.
Olympic n’est décidément pas en veine avec ses joueurs blessés, puisque Jonathan Kazadi, actuellement sur la touche, n’est pas non plus couvert par l’assurance-accident. La dégénérescence de ses tendons rotuliens est considérée comme une maladie. «On ne reçoit rien durant les 60 premiers jours d’arrêt. Dès le 61e jour, l’assurance perte de gain en cas de maladie nous versera environ 80% de son salaire», précise Nicolas Fasel, le responsable administratif d’Olympic.
Équipes nationales
Le basketball a pris les devants
Les joueurs qui se blessent avec leur équipe nationale, voilà la hantise des clubs. Les cas sont fréquents en football. Ils existent aussi en hockey sur glace. Gottéron en a fait l’expérience en mai 2009, lorsque Julien Sprunger, violemment chargé dans la bande par l’Américain Bakes lors du match Suisse - Etats-Unis, s’était retrouvé plus de six mois à l’infirmerie. «Gottéron n’avait reçu aucune aide. Ni de la Fédération suisse, ni de la Fédération internationale», se souvient Edgar Schafer, courtier en assurances, qui adopte une position tranchée par rapport aux équipes nationales. «Si j’étais président, je ne laisserais jamais partir mes joueurs en équipe nationale», affirme-t-il.
Pour éviterd’arriver à une telle extrémité, la Fédération internationale de basketball (FIBA) a pris les devants en choisissant de mutualiser les assurances de tous les joueurs engagés dans les compétitions internationales. En plus du soutien apporté aux clubs en cas de blessure, cette innovation permet aux Fédérations d’accueillir plus facilement leur(s) star(s) NBA durant l’été. «C’est une grosse plus-value pour une fédération comme la nôtre», applaudit François Stempfel, directeur de Swissbasketball.
Une distinction est évidemment faite entre les joueurs NBA et ceux qui évoluent en Europe, mais les accords s’appuient sur le même principe. L’idée est de placer dans un même panier les gros et les petits salaires. La FIBA répartit ainsi les risques et rend le montant des assurances des joueurs NBA plus accessible. «L’assurance de Sefolosha (réd: dont le salaire à Oklahoma City avoisine les 4 millions de dollars par an) nous coûte 20000 dollars par été», révèle François Stempfel. «C’est un montant acceptable», estime-t-il. Un montant bien plus abordable en tout cas que celui versé par la France qui débourse... cent fois (!) plus pour assurer les nombreux joueurs NBAde sa sélection. Il y a quelques années, les Français avaient carrément dû renoncer à Boris Diaw, un joueur à la santé fragile et au salaire important (7 mio de dollars à l’époque), en raison d’une assurance astronomique de plus de 500000 euros pour deux mois! FR